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Naissance d'une cuisinière (L. ESQUIVEL)

Imprimer Catégories : Littérature gourmande

Ça, ça s'appelle être au coeur de l'actualité ! En plein Salon du Livre 2009 spécial Mexique, voici un livre qui ne saurait que vous enchanter. C'est d'abord un film que je me souviens avoir vu il y a longtemps : Les Epices de la passion.

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Mais je crois que ce que j'avais préféré alors, c'était le titre original : Como agua para chocolate. Tout y était :

"Dans le Mexique du début du siècle, en pleine tempête révolutionnaire, Tita, éperdument éprise de Pedro, brave les interdits pour vivre une impossible passion. À cette intrigue empruntée à la littérature sentimentale, Laura Esquivel mêle des recettes de cuisine. Car Tita possède d'étranges talents culinaires : ses cailles aux pétales de roses ont un effet aphrodisiaque, ses gâteaux un pouvoir destructeur. L'amour de la vie est exalté dans ces pages d'un style joyeux et tendre, dont le réalisme magique renvoie aux grandes oeuvres de la littérature latino-américaine."

Et lire ce roman fut un vrai bonheur, pour les papilles autant que pour l'esprit. Le fil conducteur, c'est Tita, sacrifiée sur l'autel de la tradition familiale : "tu ne te marieras jamais car tu dois t'occuper de ta mère jusqu'à la fin de sa vie". Quand de surcroît la mère est une espèce de vieille peau imbuvable, mauvaise et antipathique, la perspective ets joyeuse ! Mais le roman de Laura ESQUIVEL est tout sauf triste. Ou disons plutôt qu'il sait transformer les larmes en autre chose - je ne dirai pas de la joie - et ainsi transfigurer le monde.

Chocolat amer a des aspects typiquement latino-américains dans cette manière d'aborder les choses avec lucidité et fantaisie à la fois. tradition et modernité se mêlent, comme réalité et onirisme. La loufoquerie baroque est partout, tous sont excessifs mais en même, si vrais dans leur essence même. Et puis, toujours présente, cette poésie du quotidien qui transfigure les choses les plus banales. Vous l'aurez compris, ce roman est à lire, à apprécier, à déguster.

Il s'organise en douze chapitres qui sont autant de recettes déclinées au fil du texte, depuis les tortas (petits pains pour Noël) à l'oignon et au chorizo jusqu'aux piments aux noix, en passant par les cailles aux pétales de rose du mois de mars, aux effets dévastateurs...

Comment tout cela a-t-il commencé ? Eh bien par la naissance de Tita, l'héroïne. Voici donc :

NAISSANCE D'UNE CUISINIERE

On raconte que Tita était tellement sensible que, dans le ventre de mon arrière-grand-mère, elle pleurait quand celle-ci hachait des oignons. Elle pleurait si fort que Nacha, la cuisinière à moitié sourde de la maison, n'avait pas à tendre l'oreille pour l'entendre. Un jour, à force de hoqueter, elle déclencha l'accouchement. Mon arrière-grand-mère n'eut pas le temps de dire ouf ! Tita arrivait dans ce bas monde avant l'heure, sur la table de la cuisine, dans les odeurs d'une soupe au vermicelle, du thym, du laurier, de la coriandre, de lait bouilli, de l'ail et de l'oignon. Vous devinez que la traditionnelle tape sur les fesses fut inutile. Tita était née en pleurant. Peut-être se doutait-elle que son sort était fixé, que, dans cette vie, le mariage lui serait refusé. Voilà comment Nacha racontait l'irruption de Tita sur terre : elle fut projetée dans un torrent de larmes formidable qui inonda le sol de la cuisine.

L'après-midi, la frayeur était passée et l'eau évaporée par les rayons du soleil. Nacha ramassa le résidu des larmes sur le carrelage rouge. Avec ce sel, elle remplit un sac de cinq kilos qu'on utilisa longtemps pour cuisiner.

Cet accouchement peu ordinaire explique l'amour de Tita pour la cuisine.

Laura ESQUIVEL, Chocolat amer, 1989.

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Commentaires

  • C'est un excellent moment à passer en compagnie d'un livre !!!

    Et j'attends que tu expérimentes les recettes, maintenant ! :)

  • Comme toujours, sage recommandation, Clarabel. Quant aux recettes, j'y pense, j'y pense... même si certaines proportions me font ouvrir de grands yeux !

  • Ah, une pépite ? je le note, m'en vais le feuilleter et sûrement l'offrir à une Copinette qui saura l'apprécier

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