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Auprès de moi toujours (K. ISHIGURO)

Imprimer Catégories : Ma Bibliothèque... verte !

Roman étrange que ce Auprès de moi toujours de Kazuo ISHIGURO :

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Je n'avais jamais rien lu de cet auteur, m'en étant seulement tenu à la magnifique adaptation cinématographique de ses Vestiges du jour, avec Anthony HOPKINS et Emma THOMPSON. Ici, ce sont deux choses qui ont attiré mon attention : une couverture mystérieuse d'abord, avec ce bras étendu et où cheminent des perles de verre, et la quatrième de couverture.

"Kath, Ruth et Tommy ont été élèves à Hailsham dans les années quatre-vingt-dix ; une école idyllique, nichée dans la campagne anglaise, où les enfants étaient protégés du monde extérieur et élevés dans l'idée qu'ils étaient des êtres à part, que leur bien-être personnel était essentiel, non seulement pour eux-mêmes, mais pour la société dans laquelle ils entreraient un jour. Mais pour quelles raisons les avait-on réunis là ? Bien des années plus tard, Kath s'autorise enfin à céder aux appels de la mémoire et tente de trouver un sens à leur passé commun. Avec Ruth et Tommy, elle prend peu à peu conscience que leur enfance apparemment heureuse n'a cessé de les hanter, au point de frelater leurs vies d'adultes. Kazuo Ishiguro traite de sujets qui nous touchent de près aujourd'hui : la perte de l'innocence, l'importance de la mémoire, ce qu'une personne est prête à donner, la valeur qu'elle accorde à autrui, la marque qu'elle pourra laisser. Ce roman vertigineux, porté par la grâce, raconte une histoire d'humanité, de conscience et d'amour dans l'Angleterre contemporaine. Ce chef-d'œuvre d'anticipation est appelé à devenir le classique de nos vies fragiles. "

Sans doute l'avais-je lu un peu rapidement, je n'avais pas remarqué le "chef d'oeuvre d'anticipation" de la fin, m'en étant tenue à la perte de l'innocence et l'importance de la mémoire. Je suis restée assez perplexe durant une bonne partie du livre, ayant la désagréable impression d'être tenue en lisière de l'histoire : tout était dans le non-dit, le sous-entendu, et je n'y entendais rien !

Et puis, le voile s'est peu à peu déchiré, mes yeux petit à petit se sont dessillés et toute l'histoire a surgi. Et là, j'ai pensé : quel talent ! A travers son roman, Kazuo ISHIGURO nous désoriente et nous fait réfléchir. Il crée à proprement parler une "autre réalité", et cet autre monde, si proche du nôtre, et pourtant si dérangeant ne peut que nous interpeller.

Il est très délicat de parler d'Auprès de moi toujours sans dévoiler le fond de l'histoire, mais il est cependant impossible de la dévoiler car alors tout semblerait plat, et bien loin de la finesse et de la délicatesse de l'écriture de Kazuo ISHIGURO. Je m'en tiendrai donc là : si évoluer dans un univers presque onirique, aux frontières de notre monde, sans toujours bien voir où aller ne vous déplaît pas, alors lisez-le. Sinon... passez votre chemin !

Pour toutes ces raisons, il m'était très difficile de choisir un passage qui puisse en dire un peu sans déchirer le voile. Voici une discussion entre des élèves de l'école, Hailsham, et leur enseignante, Miss Lucy.

Elle prononça enfin :

"On vous en a parlé. Vous êtes des élèves. Vous êtes... spéciaux. Alors vous maintenir en forme, vous maintenir en très bonne santé physique, c'est beaucoup plus important pour chacun de vous que pour moi."

Elle s'arrêta de nouveau et nous regarda d'une étrange façon. Après, quand nous en avons discuté, certains étaient sûrs qu'elle mourait d'envie que quelqu'un demande : "Pourquoi ? Pourquoi est-ce que c'est beaucoup plus grave pour nous ?" Mais personne ne le fit. J'ai souvent pensé à ce jour-là, et je suis certaine maintenant, à la lumière de ce qui s'est passé par la suite, qu'il nous suffisait de demander et que Miss Lucy nous aurait dit toutes sortes de choses. Il aurait simplement fallu poser une question de plus sur le tabac.

Alors pourquoi avons-nous gardé le silence ce jour-là ? Je suppose que c'était parce que même à cet âge - nous avions neuf ou dix ans - nous en savions juste assez pour nous méfier de tout ce territoire. C'est difficile aujourd'hui de se souvenir de l'étendue exacte de ce que nous savions alors. Nous savions certainement - mais pas de manière approfondie - que nous étions différents de nos gardiens, et aussi des gens normaux du dehors ; peut-être même savions-nous que dans un avenir lointain il y avait des dons qui nous attendaient. Mais nous ne savions pas vraiment ce que cela signifiait. Si nous étions désireux d'éviter certains sujets, c'était sans doute plus parce que cela nous embarrassait. Nous détestions la façon dont nos gardiens, d'habitude si maîtres d'eux-même, s'embrouillaient chaque fois que nous approchions de ce territoire. Cela nous troublait de les voir changer de la sorte. je pense que c'est pour cette raison que nous n'avons jamais posé cette question-là, et que nous avons puni Marge K. si cruellement pour avoir évoqué le sujet, après le match de rounders.

Kazuo ISHIGURO, Auprès de moi toujours, 2005.

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Commentaires

  • Je suis une inconditionnelle d'Ishiguro depuis longtemps et pourtant ce dernier roman m'a un peu déçue. Much ado about nothing. Beaucoup de bruit pour presque rien... Enfin j'en aime enfin qqchose grâce à "La cuisine rouge", c'est la couverture de l'édition poche: bien meilleure que l'autre!

  • Au moins j'aurais servi à quelque chose ! Contrairement à toi, Marie, je suis complètement néophyte en Ishiguro : je ne peux donc être aussi définitive, ne sachant pas à quoi je devais m'attendre...

  • Patricia, je ne lis meme pas le passage, parce qu'on vient de me l'offrir, en anglais, et je ne veux rien devoiler a l'avance. Je n'en ai lu qu'un seul de lui, dont je ne me souviens plus du titre d'ailleurs. J'ai hate de commencer celui-ci.

  • Finalement, ce n'est pas celui-ci que je suis en train de lire, mais Kafka on the Shore. C'est tres poetique et etrange. Je n'en suis qu'au debut.

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