Lettres de Lo (C. POUZOL) (07/05/2008)

C'est sur le blog de Cuné que mon attention a été attirée, que dis-je, titillée par ce drôle de petit livre estampillé "lectures pour ados (lescentes)".

Lettres_de_Lo

Une couverture acidulée, et une plume qui ne l'était pas moins.

"Lo écrit. Quoi ? Des lettres. A qui ? A Marika, Olivier, Maman, à un mystérieux " cher quelqu'un ", et même au président des États-Unis. Quand ? Tous les jours ou presque, entre quatorze et seize ans . Pour parler de quoi ? De son premier amour, des premières règles, de sa meilleure amie, de la naissance de sa petite sœur. Lo aime vivre, même vivre, même les jours où ça fait mal, et surtout les jours où tout va bien ! "

J'avoue que l'extrait lu chez Cuné m'avait bien fait sourire : l'évocation du "petit gnome à cheveux carotte" m'avait plus que réjoui. Comme sa consoeur de ELLE, Alix GIROD DE L'AIN, Camille POUZOL a le sens de la formule et de l'énergie à revendre. Elle s'est glissée avec délectation dans ce costume d'ado, que l'on découvre à son entrée en Seconde et que l'on quitte en Terminale. Entre temps... eh bien, c'est la vie qui a passé et que Lo, l'héroïne, nous a raconté au jour le jour.

Certes ce court roman (159 pages écrit gros, comme je dirai à mes élèves qui couinent "Mais y fait combien de pages ?) ne révolutionnera pas la littérature, mais il permet de passer un bon moment. J'y ai relevé une petite incohérence qui laisse à penser qu'il a été écrit peut-être un peu rapidement néanmoins, le ton alerte et corrosif des toutes ces lettres est tout à fait rafraîchissant. Ainsi celle-ci, écrite depuis la Corse où elle passe quelques vacances en famille...

Au début, c'est bien simple, j'ai pensé simuler une dépression nerveuse pour me faire rapatrier ! Imagine : la Corse, une maison perdue dans la montagne, mes parents qui considèrent qu'une bonne sieste commence vers 15 heures pour se terminer vers 18 heures, Lorraine qui passe ses journées à geindre avec son abruti de "Julien le sourire 49 dents", et Louis, qui a trouvé un vieux pistolet à eau dans le garage. Sans parler du fait qu'il n'y a pas de matelas sur la plage... Et puis, de toute façon, il fait tellement froid que même les autochtones se baignent pas. Bref, un cauchemar. Mais attends ! Pile quand je croyais que cela ne pouvait pas être pire, ma mère décide de tous nous traîner au bal du dimanche du village voisin ! Moyenne d'âge : 123 ans. J'ai mis un jean et un tee shirt blanc, cheveux en queue de cheval, pas même de gloss, genre "je refuse de vivre". [...] Je te jure que j'ai failli en vomir dans les virages du Cap Corse (le petit truc en pointe en haut de l'île où y a RIEN). Bref. Écoute le truc dingue : au bal, y avait un orchestre, et dans l'orchestre, y avait une batterie, et à la batterie, y avait un garçon. Un mélange entre Leonardo Di Caprio et un cheval au galop. Je te jure. J'aurais dansé sur la chenille qui redémarre. J'ai lâché mes cheveux. Et alors, pile quand je croyais que cela ne pouvait pas être mieux : des slows. Le seul endroit au monde où il existe encore des slows. Et là, il se lève, pose ses baguettes, va droit sur moi et m'invite !!! Non, non, non. Mieux, il demande à mon père s'il peut m'inviter à danser ! Trop d'Artagnan, non ? Il s'appelle Fabrizio, blond, yeux verts, bronzé, il a 17 ans, sa soeur Héléna a pile notre âge. Ils habitent le village, je sais c'est dingue, mais des jeunes vivent là toute l'année, c'est possible. Ils vont au collège à Bastia. Il a un scooter, un âne apprivoisé et il est en terminale. Depuis ce bal, c'est l'extase ! Je pense me faire naturaliser corse. On s'est embrassé le lendemain dans un champ... Il vient me chercher tous les matins, on rejoint sa soeur et toute une bande sur notre crique (celle où il y a une vache). Il me tient toujours la main, il m'adore en jean et plaît vachement à mes parents : tu penses, il déteste les boîtes de nuit (peut-être parce qu'il n'y en a pas à moins de 124 kilomètres), alors le soir, il écoute I Muvrini avec papa, sur la terrasse. Il veut devenir agrophysicien ou berger, il déteste Beyoncé (il dit "trop vulgaire", c'est pas le rêve ?), et demain, on va faire une marche dans la montagne jusqu'à une cascade. Je passe les meilleures vacances de ma vie, j'en oublié même de bronzer.

Camille POUZOL, Lettres de Lo, 2005.

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